Politique

Elisabeth MILLELIRI

Certains, qui ne craignent ni l’emphase ni l’absurde, ont même parlé de « première mondiale ». Toujours est-il que le pape François devrait se rendre en Corse à la mi-dé cembre. Depuis la fin octobre, l’éventualité de cette visite était évoquée, suscitant des réactions très contrastées, d’autant que le souverain pontife avait auparavant fait savoir qu’il ne faudrait pas compter sur lui pour la cérémonie d’inauguration de Notre-Dame de-Paris, le 7 décembre. Emmanuel Macron, qui a convié pour l’occasion dirigeants politiques et têtes couronnées, aurait mal vécu le fait que le pape non seulement décline son invitation mais choisisse d’aller en Corse quelques jours plus tard. Un camou f let pour le président français et même « un camouflet pour la France ? » hasardait l’hebdomadaire Valeurs Actuelles pour qui, visiblement, la Corse est un peu le chat de Schrödinger de la Répu blique française. Si l’idée qu’Emmanuel Macron a pu en concevoir du dépit ou de la colère fait des heureux, il est aussi des Français froissés par le choix du Saint-Père : comment peut-il, comment ose-t-il préférer Ajaccio à Paris ? Les suppositions vont bon train à propos du « vrai » motif de ce voyage lors duquel le pape devrait assister à la clôture d’un colloque sur la religiosité populaire en Méditerranée, thème qui lui est cher, a rappelé l’évêque de Li moges Pierre-Antoine Bozo pour qui « la question n’est pas tant la Corse et la France que la dévotion populaire sur laquelle il estime peut-être avoir encore des choses à dire ». Mais pour d’autres, il y a forcément autre chose : et si ce « pape mondialiste » voire « isla miste » cherchait à convaincre les Corses de faire de leur île une Lampedusa française ? Au jeu des suppositions louftingues, des Corses jamais en retard d’une macagna relancent : et si le but de la visite était d’annoncer un processus visant à réintégrer l’île au sein des terres vaticanes ? Ou le rétablissement de la Garde corse papale dissoute par Alexandre VII sous la pression de Louis XIV ? Et s’il était accro au figatellu ? À moins qu’il ne s’agisse d’un geste miséricordieux en faveur des hôteliers corses « sinistrés », qui à présent affichent déjà complet et dont les tarifs ont parfois triplé. La foi fait des miracles. Elisabeth MILLELIRI