La polémique ayant suivi la communication autour du « Green pass » confirme la nécessité de procéder le plus rapidement possible à une large concertation sur les modalités du déconfinement dans les différents secteurs d’activité. En effet, chaque mesure de protection contre l’épidémie peut entrainer inconvénients et incompréhension d’une partie de la population. C’est la raison pour laquelle nous avions proposé il y a plusieurs semaines la réunion d’un Comité de préfiguration du déconfinement composé de scientifiques et d’élus de toutes les tendances politiques, lequel aurait pour mission de rencontrer les responsables de chaque secteur afin de décider avec eux des mesures à mettre en œuvre. Ce n’est que par une telle concertation, dans la transparence la plus totale, que l’on peut espérer parvenir à une acceptabilité sociale convenable de ces mesures. La question de la réouverture des établissements scolaires à partir du 11 mai avait déjà donné lieu à de nombreuses difficultés. Celle de la reprise des activités touristiques reste largement devant nous. 

Malgré les incertitudes relatives à l’évolution de l’épidémie, quelques évidences doivent rapidement être prises en compte. Des problématiques structurelles affectant depuis des décennies l’économie touristique de la Corse verront leurs effets démultipliés par la crise actuelle. Nous prendrons ici seulement trois exemples :

- Les contraintes liées à l’insularité : ces dernières concernent l’ensemble du monde économique et notamment le secteur touristique, compte tenu de surcroît du faible impact de la « clientèle domestique ». Ces contraintes nous avaient conduits à proposer un Statut fiscal et social spécifique visant à placer les entreprises corses à égalité avec les entreprises européennes continentales. Cette spécificité doit aujourd’hui nous inciter à relancer les discussions avec l’Etat, afin de prendre en compte la situation particulière de la Corse tant au niveau des mesures structurelles (Statut fiscal et social pérenne) qu’à celui des mesures conjoncturelles (aides liées à la crise). C’est dans cet esprit que doivent être appréciées et adaptées les dernières annonces du comité interministériel relatives au tourisme. 

- La question du paracommercialisme, à savoir l’offre non professionnelle et non déclarée. Cette concurrence déloyale représente depuis des années 75% de l’offre en Corse. L’Etat n’a jamais engagé la moindre démarche pour s’y attaquer. Il est à craindre que ce secteur illégal n’applique aucune des mesures de protection sanitaires qui seront imposées aux professionnels et auxquelles ces derniers sont évidemment prêts à se soumettre. La problématique posée par le paracommercialisme était jusqu’à présent de nature économique et sociale. Elle sera cette année également sanitaire.

- La fragilité des entreprises familiales et patrimoniales corses : cette fragilité sera lourdement aggravée par la crise actuelle et il y a fort à craindre que de grands groupes, voire des intérêts troubles, se positionnent pour racheter ces structures en difficulté, ce qui accentuera le phénomène de dépossession et de dénaturation de notre tissu économique.
 
En tout état de cause, s’agissant de la levée du déconfinement, il paraît indispensable d’engager sans tarder une concertation avec les représentants du secteur touristique.
Le 7 mai dernier, notre proposition de création du Comité de préfiguration du déconfinement a finalement été intégrée au rapport voté par l’Assemblée.
Nous demandons donc au Président de l’exécutif de réunir sans tarder ce Comité avec les représentants de l’industrie touristique et des opérateurs de transport, afin notamment de rechercher les bases d’un accord sur les nécessaires mesures de protection liées aux arrivées en Corse dans les semaines à venir, à commencer par celles des Corses résidant actuellement hors de l’île.